Qu’est-ce que la vie consacrée ? Explication de texte dans La Croix
La vie consacrée recoupe des réalités extrêmement diverses, héritage d’une histoire millénaire qui l’a vue s’adapter en permanence aux réalités du monde et de l’Église
Contrairement à une idée reçue, la vie consacrée ne se résume pas à la seule vie religieuse. Comme le rappelle le code de droit canonique, la vie consacrée est « la forme de vie stable par laquelle des fidèles (…) se donnent totalement à Dieu aimé par-dessus tout (…) pour la construction de l’Église et le salut du monde » afin de parvenir « à la perfection de la charité dans le service du Royaume de Dieu » (canon 573 § 1).
Ainsi que le soulignait Jean-Paul II dans l’exhortation apostolique Vita consecrata, écrite en 1996, deux ans après un Synode des évêques sur le sujet, « le fondement évangélique de la vie consacrée est à chercher dans le rapport spécial que Jésus, au cours de son existence terrestre, établit avec certains de ses disciples, qu’il invita non seulement à accueillir le Royaume de Dieu dans leur vie, mais aussi à mettre leur existence au service de cette cause, en quittant tout et en imitant de près sa forme de vie » (§ 14). Ainsi, les personnes consacrées se distinguent-elles par la profession qu’elles font – via des vœux ou un autre engagement – des conseils évangéliques de chasteté, de pauvreté et d’obéissance.
Le pape polonais indiquait aussi que la vie consacrée « n’est pas une réalité isolée et marginale » mais qu’elle « est une partie intégrante de la vie de l’Église » appartenant« de manière intime à sa vie, à sa sainteté et à sa mission » (§ 3). Il ajoutait aussi que, dans l’histoire de l’Église, la vie consacrée a connu de nombreuses formes« mais sans changement de la nature d’un choix qui s’exprime dans le radicalisme du don de soi par amour du Seigneur Jésus ».
Quelles en sont les différentes formes ?
Une grande part de la vie consacrée est constituée par la vie religieuse, religieux et religieuses se distinguant par « des vœux publics » et une vie fraternelle en commun (canon 607 § 2). La vie religieuse peut prendre elle-même différentes formes : monastique et contemplative (bénédictins, cisterciens, chartreux, carmélites…) ou apostolique (dominicains, jésuites, Frères des écoles chrétiennes, ursulines…).
Assimilées aux instituts religieux, les sociétés de vie apostolique (Missions étrangères de Paris, communauté Saint-François-Xavier…) se distinguent par le fait que leurs membres, tout en menant une vie fraternelle en commun, n’émettent pas de vœux religieux (canon 731 § 1).
Reconnus en 1947 par Pie XII, les instituts séculiers rassemblent des individus qui, sans vie commune, mènent leur vie « dans les conditions ordinaires du monde, seuls ou chacun dans sa famille, ou encore dans un groupe de vie fraternelle » (canon 714). Les membres d’un institut séculier peuvent être des prêtres diocésains (Institut du Prado…) ou des laïcs, hommes ou femmes (Jésus Caritas…) qui, vivant dans le monde, « tendent à la perfection de la charité et s’efforcent de contribuer surtout de l’intérieur à la sanctification du monde » (canon 710). Ils sont liés par des vœux ou une promesse.
Les vierges consacrées représentent quant à elles une des plus anciennes formes de vie consacrée connues dans l’Église, citée dès les écrits de Paul et dans les Actes des Apôtres. Consacrées à Dieu par l’évêque diocésain, auquel elles sont liées, selon un rituel liturgique hérité de longue date, les vierges « épousent mystiquement le Christ Fils de Dieu et sont vouées au service de l’Église » (canon 604 § 1) et font partie de l’ordre des vierges.
Y sont souvent assimilées les veuves consacrées, elles aussi connues dès les temps apostoliques, même si elles ne figurent pas comme telles dans le code de droit canonique – mais elles sont citées avec les vierges dans le code des canons des Églises orientales (canon 570). En 1984, Rome a approuvé un rituel spécifique de la consécration des veuves qui, selon les endroits, se rassemblent dans des instituts séculiers (Institut Sainte-Françoise-Romaine) ou des associations de fidèles (Fraternité Notre-Dame de la résurrection).
L’Église reconnaît aussi les ermites qui « vouent leur vie à la louange de Dieu et au salut du monde dans un retrait plus strict du monde, dans le silence de la solitude, dans la prière assidue et la pénitence » (canon 603 § 1). L’ermite fait profession publique entre les mains de l’évêque, sous l’autorité duquel il mène sa vie érémitique.
Enfin, dans la foulée du concile Vatican II, de nouvelles formes de vie consacrée ont fait leur apparition, notamment au sein des communautés charismatiques qui comptent elles aussi leurs propres consacrés. Leurs statuts sont divers : s’ils sont souvent membres d’associations de fidèles (consacrés de la communauté de l’Emmanuel, consacrées de la communauté du Chemin-Neuf), une certaine normalisation est à l’œuvre aujourd’hui comme dans le cas de la communauté des Béatitudes. Celle-ci a adopté une nouvelle figure juridique, inédite dans le code de droit canonique mais validée par Rome : la famille ecclésiale de vie consacrée, à mi-chemin entre l’institut religieux et l’institut séculier, qui rassemble les deux branches de vie consacrée (frères et sœurs, qui font des vœux publics) et la branche laïque (couples et les célibataires consacrés qui ne prononcent pas de vœux).
Lexique
L’ordre, la congrégation ou l’institut désigne un ensemble d’hommes ou de femmes vivant en commun un idéal de perfection chrétienne à la suite du Christ (sequela Christi).
Autrefois, l’ordre désignait plus spécifiquement les mouvements dont les membres prononçaient des vœux de manière solennelle (bénédictins, franciscains, jésuites), à la différence de ceux des congrégations, de création plus récente, qui ne prononçaient que des vœux simples (rédemptoristes, montfortains, assomptionnistes). Le code de droit canonique de 1983 n’a pas repris cette distinction entre vœux solennels et simples et ne parle plus que d’institut religieux. En droit français, une congrégation désigne tout groupe de religieux vivant en communauté, quelle que soit leur religion ou la forme de vie consacrée.
La communauté désigne un groupe de consacrés qui, ayant fait profession de vie commune, vivent ensemble dans la même maison. Certains instituts ont aussi pris comme nom le terme générique de communauté.
Nicolas Senèze
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