Eglise catholique de Martinique - Mot de l’évêque - L’avenir
appartient aux fous
vendredi 20 avril 2018,
par Mgr David MACAIRE Archevêque de Saint-Pierre et
Fort-de-France
En Martinique, comme ailleurs,
l’avenir que notre génération propose aux jeunes est imprégné d’une sagesse
surannée et trompeuse. Elle sent mauvais la culture bien-pensante couverte d’un
verni de christianisme moralisateur, endormi et médiocre. « Ma manman m’a dit
comme ça… » . On comprend que nos fils et nos filles fuient dès que possible ce
qui leur paraît sans radicalité et cherchent désespérément, jusqu’au suicide
parfois, d’autres modèles de vie, d’autres types d’existence.
Alors qu’ils risquent l’obésité
psychologique (lassitude, oisiveté, trop-plein...) en s’empiffrant de futilités
à travers des écrans de différentes tailles, le monde n’a d’autres rêves à
offrir aux jeunes que des idéaux bourgeois. Chaque idéal n’est en fait qu’un «
canapé » (bon ou mauvais), un lieu tranquille où semble exclu le moindre effort
: canapé des bonnes études, canapé d’une petite vie sans vague, canapé d’une
pratique religieuse ni-trop-ni-trop-peu, canapé de parents conciliants et
camarades, canapé des amours tranquilles et sans effort, canapé d’une sexualité
jouisseuse, canapé de l’argent et du luxe, canapé d’une bonne réputation, canapé
des amis nombreux et fidèles, canapé des grossesses désirées, canapé d’un corps
svelte et sportif, canapé d’une morale remplie de bons sentiments, canapé d’une
vie sans danger, sans maladie et sans mort…
Le message transmis est clair :
le bonheur n’est possible que dans un canapé, installé dans la facilité et
l’insouciance d’un intérieur cossu et confortable… Et pourtant, nous savons
tous que ces choses ne sont pas accessibles au plus grand nombre et que seule
une élite y a accès. Ainsi, lorsque les « bons » canapés s’avèrent
inaccessibles à la grande majorité, beaucoup se jettent sur les sofas de la
TV-réalité, de la drogue, de la violence, des jeux vidéo, de la pornographie,
des débauches et des orgies, des sectes et des idolâtries… La liste des refuges
impurs est longue pour ceux qui cherchent à s’affaler quelque part et à trouver
la sécurité à tout prix, sous une couette ou un coussin. An ba fey, si vous
préférez !
Rappelons-nous, 170 ans après
l’abolition, que l’esclavage du coussin est peut-être pire que celui des
chaînes. Celui-là ne fait pas mal, il ne conduit pas à la révolte à force de
souffrance ; il n’exploite pas le travail mais l’oisiveté ; il ne meurtrit pas
le corps, mais appesantit le cœur ; il ne tanne pas la peau, mais il implose le
squelette. Il n’y a pas de « Nègre Marron » dans cet esclavage-là. Personne ne
songe à fuir, les jambes sont paralysées. Sauf ceux qui renoncent au canapé
pour chausser leurs chaussures de marche et partir à l’aventure. C’est du moins
ce que conseille le Pape François à la jeunesse dans son message des JMJ de
Cracovie….
En appelant aujourd’hui les
jeunes à répondre à l’appel de Dieu à la vie consacrée ou à la prêtrise, j’ai
conscience, face au monde, face à certains chrétiens et face aux jeunes
eux-mêmes, que beaucoup ne comprennent pas la folie de la vocation. Oui ! L’Eglise
incite consciemment les jeunes à une rébellion spirituelle face à toute une
civilisation mourante dont la soi-disant sagesse n’est rien d’autre que le
résultat d’une colonisation idéologique de l’Occident athée et matérialiste.
Chers jeunes, soyez les nouveaux
« Nèg Maron ». Le Nèg Maron
d’aujourd’hui, c’est le garçon qui se dit prêt à répondre à l’appel et à donner
sa vie pour servir l’Eglise ; c’est la jeune fille qui accepte d’offrir sa féminité
au Christ ; c’est le baptisé qui choisit Jésus.
Si ce monde est sage, alors
j’appelle des fous ! Et c’est tant mieux, car « Ce qu’il y a de fou dans le
monde, voilà ce que Dieu a choisi ! ».
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